Limiter le réchauffement de la planète à 2°C, voire 1,5°C comme le prévoit l’Accord de Paris se fera difficilement sans capture de gaz à effet de serre. Mais la manière dont cette capture est envisagée pourrait être contre-productive, observent des scientifiques de l’Université d’Exeter, au Royaume-Uni.
Dans leur viseur: la technologie BECCS, une combinaison de production d’énergie à partir de biomasse et de capture et stockage de carbone, qui suscite beaucoup d’espoirs. Selon l’étude publiée ce lundi dans la revue "Nature Communications", les effets bénéfiques de cette technologie risquent d’être largement compensés par ses effets pervers.[...]
"La vaste majorité des scénarios actuels du Giec (groupe d’experts climatiques de l’ONU, NDLR) sur la manière dont nous pouvons limiter le réchauffement climatique à moins de 2°C incluent la technologie BECCS", indique Dr Anna Harper, premier auteur de l’étude. Or la surface nécessaire pour faire pousser de la biomasse dans ces scénarios "serait deux fois la taille de l’Inde".
Le dégagement de CO2 qui résulterait de la conversion de vastes zones pour développer la BECCS pourrait largement contrebalancer les émissions capturées et stockées, et protéger et régénérer les forêts serait une meilleure option dans beaucoup de cas, calcule le groupe de chercheurs. Quand des champs de bioénergie remplacent des écosystèmes fortement chargés en carbone, la (re)forestation et la déforestation évitée sont généralement plus efficaces pour la suppression de CO2 que les BECCS.
Les concentrations de gaz carboniques dans l’atmosphère sont déjà très proches de celles associées à une stabilisation du réchauffement à 1,5°C, rendant indispensable, pour atteindre cet objectif, le développement d’émissions "négatives", à côté des réductions d'émissions. En Europe, le premier projet de BECCS est en cours au Royaume-Uni. Le développement de ce type de technologies dépend de la définition d’un prix au carbone suffisamment incitatif.