Les projets d’agriculture urbaine se multiplient, avec des objectifs variés : alimentation durable, donc locale, lien social, bien-être des populations, éducation à la nature, biodiversité, verdissement et aménité du paysage urbain, renforcement de l’autonomie des urbains et sécurité alimentaire etc. Mettre l’agriculture dans la ville ou à proximité immédiate de celle-ci a effectivement du sens, notamment d’un point de vue écologique.
Selon l’historien Jean-Michel Roy, spécialiste du monde rural et responsable de l’unité patrimoine à la mairie de La Courneuve en Seine-Saint-Denis, la ville et l’agriculture du XIXème siècle représentaient un modèle d’économie circulaire en matière de gestion des flux de matière. Les maraîchers livraient leur fruits et légumes et repartaient avec leur tombereaux remplis de déchets variés : fumiers de cheval (Paris comptait plus de 100 000 chevaux à la fin du XIXème), effluents des abattoirs, drêches des brasseries, meules des champignonnières, déchets verts, déchets domestiques divers, etc. Ces déchets étaient ensuite répandus sur les champs. En 1913, les exportations d’azote vers l’agriculture représentent environ 40 % des entrées d’azote alimentaire, soit plus de 9 100 tonnes (Barles, 2005). « Paris rend en engrais ce qu’il reçoit en nourriture », observait l’écrivain Maxime Du Camp en 1879.[1]
En France, la production de déchets organiques (hors déchets de l’agriculture et de la sylviculture) est de 46,4 millions de tonnes, dont 7,1 millions issus de déchets de cuisine collective, et 5,1 millions de déchets domestiques (ADEME, 2015). Les fermes urbaines sont une opportunité de création d’économie circulaire : elles pourraient permettre de traiter et assimiler une partie de ces flux de déchets via la mise en place de substrats intégrant ces déchets urbains, sous une forme compostée ou brute.
Le potentiel de l’agriculture urbaine dans le domaine de l’économie circulaire ne concerne pas seulement les flux de matières : la chaleur dégagée par certaines installations urbaines pourrait permettre de chauffer des serres, les plantes pourraient permettre de purifier des fluides urbains comme l’air ou l’eau, voire dépolluer des sols urbains contaminés. Les déchets agricoles pourraient être méthanisés pour produire de l’énergie. Les possibilités sont multiples et c’est pourquoi pour Guillaume Morel-Chevillet (note 1), l’avenir est dans la mise en réseau des projets d’agriculture urbaine, sur le modèle de la smart city, au niveau d’un territoire.[...]